Différencier l’expérience client de la culture client
Pour nous expliquer clairement la différence entre ces deux concepts, Guillaume nous donne l’image d’une fleur : « Imaginons que l'expérience client est une fleur et l’entreprise veut proposer une belle fleur à ses clients. La fleur de l'expérience client. On veut montrer à nos clients une fleur un peu différente des autres, qui donne envie. Pour que cette fleur pousse, les entreprises vont chercher des graines un peu originales (…) Le problème c’est que parfois la graine ne pousse pas car le terreau n’est pas fertile. Personne ne s’en préoccupe du terreau. (…) Le problème ce n’est pas la graine, c’est l’état d’esprit de l’entreprise. On est sur un problème de culture ».
Cette métaphore nous explique clairement que pour offrir une belle fleur qui perdure, c’est-à-dire une bonne expérience client, il faut travailler en amont la culture client. Elle repose sur les valeurs, l’état d’esprit et l’engagement de toute l’entreprise, bien avant que l’expérience ne soit vécue. Une culture forte et centrée sur le client crée les conditions idéales pour offrir une expérience client inégalable.
Le concept de la culture client vu par les entreprises
Maxime Santilli (Sqwad) : « Et alors ce sujet-là, par les entreprises, comment est-il perçu et est-ce qu’elles le digèrent, est-ce qu'elles en ont conscience ? »
Guillaume Antionietti (COS System) : « Je trouve que depuis 2/3 ans, le sujet est en train d’émerger ».
Selon notre expert, les entreprises commencent à se rendre compte que leurs efforts en matière d'expérience client ne génèrent pas encore un retour sur investissement suffisant. Ce qui entraîne un questionnement « Qu'est-ce qui nous manque ? », et la réponse semble être la culture client : un élément souvent négligé, mais crucial pour améliorer l'impact de leurs initiatives sur la performance client. L'idée n'est pas de remettre en cause l'expansion de l'expérience client, mais plutôt d'intégrer un travail sur la culture pour en maximiser les bénéfices souligne Guillaume.
Impact de l’IA sur la culture client : trouver un équilibre
Maxime Santilli (Sqwad): « La culture client qui arrive par la suite avec l’IA dans cet aspect frontline mais aussi en back office, comment l’interprètes-tu et comment éduques-tu tes clients ? »
Guillaume Antionietti (COS System): « L’intelligence artificielle va aider, va équiper mes collaborateurs à mieux répondre, mais il y a un problème en termes de culture : si j’ai besoin de travailler l’état d’esprit de mes équipes, j’ai aussi besoin de travailler leur niveau de jeu ».
Le déclencheur de l'évolution de la culture client ces dernières années réside dans l'intégration de nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle.
L'IA, en facilitant les interactions client à la fois en front office et en back office, aide les collaborateurs à répondre de manière plus précise et adaptée, notamment en détectant des émotions comme l'énervement ou l'agacement. Cependant, le risque est de se concentrer uniquement sur la technologie au détriment de l'amélioration continue des compétences humaines et de la culture client. L'évolution de la culture client, selon Guillaume Antionetti, doit se faire en parallèle : il est essentiel de continuer à « muscler » les équipes et à les doter d'outils technologiques pour qu'elles atteignent un niveau d'excellence tout en bénéficiant des avantages de l'IA. « L’idéal c’est de continuer à faire monter leur niveau de jeu en termes de préoccupation client et en plus de les doter des outils d'aide » explique Guillaume.
Mesurer et renforcer la culture client : des KPIs à la confiance des équipes
Maxime Santilli (Sqwad): « Par rapport aux performances et aux KPIS, peux-tu me donner quelques informations sur les métriques que tu suis pour justifier la performance, la pertinence de tes actions ? »
Guillaume Antionietti (COS System): « On a identifié que le niveau de culture client qui est mesuré très scientifiquement à travers notre outil de diagnostic, est directement lié au NPS, c'est-à-dire au niveau de satisfaction des clients ».
Notre expert déclare suivre principalement le NPS (Net Promoter Score), qui mesure la satisfaction client. Il a pu constater que le niveau de culture client, mesuré scientifiquement via un outil de diagnostic, est directement lié au NPS. Plus la culture client des équipes est développée, plus le NPS augmente, ce qui se traduit par une amélioration de la performance commerciale des unités : « C’est démontré par les scientifiques sur des méta analyses. Mais nous, on le voit de façon expérimentale, comme les missions qu'on peut mener. »
Maxime Santilli (Sqwad): « Selon toi, si tu devais avoir une liste de piliers incontournables pour faire réussir une équipe, qu’elle soit de petite ou de grande taille, quels seraient ces piliers-là ? »
Guillaume Antionietti (COS System): « Il faut d’abord identifier deux dimensions : la première c’est l’environnement de travail de mes équipes (…) et le deuxième pilier : mes propres croyances et valeurs individuelles ».
Notre expert nous explique que pour réussir une équipe, il est essentiel de créer un environnement de travail favorable, où les collaborateurs se sentent soutenus et responsabilisés. Un management exemplaire, une gestion claire des priorités et une bonne connexion avec les attentes clients sont primordiaux. Donner de l’autonomie aux équipes dans leurs décisions quotidiennes renforce leur engagement et leur permet de mieux répondre aux besoins des clients. Guillaume explique : « Il faut que le manager soit présent et à l'écoute, capable de guider ses collaborateurs dans la transformation continue de leurs pratiques. »
En parallèle, il est crucial de travailler sur les convictions et valeurs individuelles des collaborateurs. Pour qu'ils adoptent une véritable culture client, il faut leur permettre de comprendre l'importance de la relation client et de transformer leurs automatismes. Cela passe par entres autres un travail sur leurs comportements et leurs réflexes, afin qu’ils intègrent pleinement la culture de l’entreprise et deviennent des acteurs clés de l’expérience client.
Maxime Santilli (Sqwad): « Concernant donc cette culture d'entreprise, cette culture client et l'expérience client, la notion de confiance est importante selon toi ? »
Guillaume Antionietti (COS System): « Elle est fondamentale. Elle fait partie de ce pilier de l'environnement de travail. »
La confiance est essentielle dans la relation client et la culture d'entreprise selon notre expert. Selon lui, un collaborateur qui ne se sent pas en confiance avec son manager n’osera pas prendre d'initiatives, ce qui est pourtant crucial dans un environnement où les attentes clients sont diverses et évolutives. La confiance permet de donner aux équipes la liberté de réagir rapidement et de prendre les bonnes décisions pour le client, sans toujours devoir attendre une validation supérieure. Comme il l’explique : « Il est indispensable d’avoir des managers qui laissent la confiance aux collaborateurs. Certes, certains vont se planter, mais on a beaucoup plus à gagner qu’à perdre. »
Recrutement et culture client : identifier et cultiver l'engagement dès l'embauche
Maxime Santilli (Sqwad): « Est ce qu'on peut dès le processus de recrutement, identifier des profils qui vont avoir une faculté ou une capacité ou une proximité supplémentaire avec l'audience ou avec un secteur pour faciliter ça, ou est-ce que ça s'improvise ? »
Guillaume Antionietti (COS System): « Il faut le détecter. A minima, dans l'entretien, il faut détecter chez notre interlocuteur, dans sa capacité à pouvoir gérer de façon autonome une situation complexe. »
Pour Guillaume, il est possible, dès le processus de recrutement, d'identifier des profils ayant une capacité particulière à réagir face à des situations complexes et à prendre des initiatives. Cela se détecte notamment lors des entretiens, où il faut observer la capacité du candidat à gérer des situations ambiguës sans se référer systématiquement à un supérieur. Il souligne l'importance de repérer ceux qui, face à un problème, prennent l'initiative de trouver une solution, même si cela sort du cadre habituel, avant de demander une validation. Toutefois, il aborde une limite : « Ce qui n’est pas simple, c’est que parfois des équipes sont prêtes à faire, mais les managers ne veulent pas. »
Maxime Santilli (Sqwad): « Chez Sqwad, avec plus de 25 000 agents, le recrutement prend en compte à la fois la proximité géographique et l'affinité avec les clients (…) penses-tu que cette proximité avec l’audience est un facteur déterminant pour la réussite de l’expérience client ? »
Guillaume Antionietti (COS System): « Moi, je teste ce sujet de façon scientifique avec mes mesures implicites (…) ça permet d’identifier très vite, indépendamment de ce que la personne raconte d’elle-même ».
D'après Guillaume, pour évaluer la véritable capacité d'un candidat à s'engager authentiquement dans une relation client, il est crucial d'utiliser des outils scientifiques comme le test d'association implicite. Ce test, selon lui, permet de mesurer la loyauté d'un candidat en analysant ses réflexes inconscients, indépendamment des discours ou des comportements appris. Il insiste sur le fait que "ce test nous aide à voir ce qu'il y a dans le ventre, dans le cerveau, et à identifier ceux qui, malgré une bonne figure, prennent sur eux plutôt que d'agir spontanément."
Le spécialiste souligne également l'importance du management dans la formation des automatismes chez les collaborateurs. En renforçant systématiquement les émotions positives après des interactions réussies, "on aide le cerveau à ancrer les bons réflexes", précise-t-il. En procédant à des débriefs où l'on invite les collaborateurs à exprimer leurs émotions positives, on crée un environnement propice à l'activation de comportements authentiques. Il ajoute que "si cette pratique est ritualisée, elle permet de muscler les automatismes du collaborateur, rendant ainsi l'empathie et l'engagement naturels dans les interactions futures."
Les facteurs clés pour une culture client réussie
Pour Guillaume Antionetti, toutes les entreprises,ont leurs forces et leurs faiblesses en matière de culture client. Il souligne que ce qui fait la différence, c’est l’implication du top management, non seulement par le soutien verbal, mais par des actions concrètes. Les entreprises les plus réussies en matière de culture client sont celles où les dirigeants prennent des décisions stratégiques qui, même si elles peuvent nuire à court terme aux résultats financiers, visent à renforcer la relation client à long terme. L'exemplarité des dirigeants et leur capacité à faire preuve de leadership, comme l’acceptation de couper des clients non stratégiques, est essentielle.
L'expert observe également que certains managers ont su évoluer et transformer leur approche en matière de management, en intégrant des pratiques comme le renforcement des émotions positives et la gestion des comportements internes. Il précise que des actions simples mais efficaces, comme empêcher les commentaires négatifs sur les clients au sein de l’entreprise, peuvent profondément changer l’état d’esprit et ainsi, les comportements. Ces petites actions, bien que paraissant anodines, ont un impact majeur sur la culture client et l'engagement des équipes.